11/2/13
Ce matin, au bureau, correction de modules de formation.
Les textes que je remanie sont des fiches techniques,
décrivant des procédures informatiques. Leur rédaction actuelle me laisse
songeuse. L’auteur semble avoir ignoré les principes du mode
d’écriture approprié au sujet: simplification des phrases, réduction du
nombre de mots, choix unique du mode de « dialogue » avec le
lecteur. Car il s’agit de dire à celui qui ne sait pas ce qu’il faut faire.
Objectif numéro un : être compris de tous. Ne pas laisser de doute, aucune
ambiguïté. On ne fait pas de la poésie, ici, Monsieur. On fait dans le mode
d’emploi.
Pour lui expliquer la procédure, on peut s’adresser au
lecteur directement, par injonctions sur le mode de l’impératif présent, à la
deuxième personne du pluriel. On lui dit « vous », car dans cette
communication-là, on évite de se tutoyer. Gardons de la distance.
« Choisissez » dit-on à l’élève. Et tout de suite ! On lui donne
des ordres.
Ou bien le rédacteur utilise l’infinitif, moins autoritaire,
moins dirigiste, endossant le rôle d’un conseiller savamment flou, entretenant
avec le lecteur une relation plus vague. "Cliquer sur" sous-entendu, « un jour peut-être, quand le moment sera
venu…on peut « cliquer sur».
Mais il est exclu de mélanger les deux styles : la
règle est de choisir le contrat d’interlocution et de ne pas en changer.
Les pages que je travaille mélangent allègrement les deux.
Il s’ensuit à la lecture une sorte de malaise, où l’on se sait plus s’il faut
suivre les consignes avec le petit doigt sur la couture du pantalon… ou s’il est
permis de lever la tête pour regarder les papillons.
En attendant, je tranche dans le vif, je résume, j’élague.
En choisissant deux mots différents pour désigner la même action, ou le même
objet, l’auteur voulait sans doute « bien écrire ». Il croyait bien
faire. Se vantait même peut-être d’avoir été « plutôt bon » en
rédaction à l’école….
Je supprime sans état d’âme toutes ses petites fioritures,
et j’appauvris encore son malheureux texte qui, dès l’entrée, n’avait rien de
palpitant.
Quelle affaire éloignée des préoccupations
d’écrivaillons rêveurs qui voudraient jouer avec les mots !
Mais la journée me réservait d’autres surprises.
Je reçus tout à l’heure l’information suivante:
L’accès à l’application Schmilblik
rencontre depuis le début de semaine des difficultés l’après-midi (lenteurs,
comportements aléatoires allant jusqu’à des interruptions de service).
Celles-ci ne sont pas dues à l’application en tant que telle mais à son
paramétrage sur la nouvelle architecture informatique pour absorber la montée
en charge correspondant à la généralisation.
Pour autant, l’application Schmilblik
reste accessible et toutes les actions techniques sont mises en œuvre pour
remédier au plus vite à ces dysfonctionnements.
Afin d’améliorer à court terme le
niveau de service de l’application Schmilblik, un redémarrage
quotidien d’une partie des services est prévu pendant la pause méridienne entre
12h30 et 13h00.
La continuité de service sera
normalement assurée. Il est néanmoins possible que l’utilisation de
l’application soit perturbée pendant le déroulement de ces opérations.
Nous vous tiendrons informés des
solutions définitives apportées au système Schmilblik pour
rétablir un niveau de service nominal.
En l’analysant plus finement je m’aperçois que ce message-là
est remarquable.
Car il parvient à me dire tout à la fois que Schmilblik ne
fonctionne pas mais marche quand même. Soit tout et son contraire.
D’ailleurs, lorsqu’on arrête Schmilblik, le service continue.
(Mais on ne peut pas forcément l’utiliser)
Quant au niveau de service nominal, je n’ai pas osé demander
de quoi il s’agissait.
Enfin, tout ça, ce n’est pas de la faute de Schmilblik, mais
de son paramétrage.
Ce qui signifie que Schmilblik et le paramétrage de
Schmilblik s’incarnent en deux entités distinctes, qui à l’instant présent se
regardent probablement en chiens de faïence.
C’est comme ça qu’on finit par envie d’écrire …pour écrire.
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