vendredi 8 mars 2013

vendredi 8




8/3/13
Exercice de style (Au clair de la plume, premier essai)

C’était vendredi, jour de marché. Elle avait voyagé depuis le matin, et les cahots de la petite route défoncée l’avaient obligée à se cramponner de toutes ses forces aux parois du camion, pour ne pas basculer comme la dernière fois. Les secousses s'arrêtèrent enfin, le moteur se tut, le conducteur descendit et claqua la porte. Le camion trembla et elle faillit encore dégringoler de son perchoir. L’homme ouvrit le coffre et avec de grands « hemmf » commença à le vider de ses cageots de salades et de fleurs.
Elle entendait les cris des maraîchers qui se hélaient au loin, les ronflements des moteurs de véhicules, les coups de frein et les claquements des portières, des coups de klaxon impatients, les tubes de métal qu’on assemblait pour monter les étals, les caisses en bois qu’on posait au sol et les cantines qui bringuebalaient en sonnant comme des cloches.
Elle profita de l’inattention de l’homme occupé au déchargement de sa cargaison pour descendre discrètement de l’autre côté, à petits pas courus et rapides,  en direction de la chaussée. Puis elle grimpa sur le trottoir et fit tourner son œil tout autour d’elle. Ici, cela sentait la poussière et la fumée, mais il n’y avait pas grand-monde, sauf un être bas sur pattes poilues, qui soufflait comme une forge et vint la renifler mais ne la bouscula pas. Elle vit bouger à proximité plusieurs grosses godasses boueuses qui avançaient en raclant le sol, mais aucune ne s’approcha d’elle. Puis défilèrent deux mocassins vernis enserrant des pieds fins, gainés d’un voile noir, qui faisaient ploc ploc en passant sur la piste.
Sinon, rien. Elle était arrivée dans un presque désert. Elle commençait à avoir faim, son dernier repas devait remonter à plusieurs heures. Il fallait qu’elle trouve quelque chose !
Elle interrogea son ordinateur sensoriel, qui préconisa de trottiner droit devant, ce qu’elle fit, en regardant de tous côtés pour ne pas se faire écraser par une chaussure en traversant le trottoir. Puis elle s’engagea dans une rainure noirâtre qui courait le long de l’encoignure, c’était un peu casse-gueule comme chemin, mais au moins c’était plus sûr, il n’y avait pas beaucoup de circulation dans ce coin-là. En remontant le long du mur, elle capta une puissante odeur de café, puis soudain, elle huma son parfum puissant, doux mélange de fleur d’oranger, de crème genre Nivea et d’humain. Et tout à coup, elle l’aperçut, l’humaine du jour, avec ses longues jambes appétissantes délicieusement nues, se réchauffant au soleil du matin, tellement bonnes à croquer.

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